Comme prévu la mission d'identification de l'épave supposée du MS Monique a été réalisée dans la nuit du 19 au 20 mars. L'identification de la cible principale, repérée au sonar latéral lors de la mission précédente réalisée avec le NO Alis, a été effectuée par le robot sous-marin (ROVJET 402), du navire câblier Ile de Ré.
Le robot a atteint la cible par 400 mètres de profondeur en parcourant sur ses chenilles plusieurs lignes parallèles. Un sonar détectait sur 60 m, à l'avant du robot, le profil du fond. Ainsi, ont été localisées en amont de la cible une bouteille de type Cointreau et deux bouteilles de bière contemporaines de l'US Navy. La bouteille de type Cointreau a été saisie par le bras manipulateur et s'est cassée avant l'introduction dans le panier de récupération. Ensuite, la cible a été atteinte et se présentait comme une dôme corallien allongé recouvert d'organismes, d'une longueur de 35 m environ et semblable aux dimensions du MS Monique.
Le robot, équipé d'un détecteur de métaux, a contrôlé l'absence de masses métalliques qui auraient pu être recouvertes par le corail. Il est à signaler que les excellentes conditions de mer ont favorisé la mise à l'eau du robot et sa conduite à partir du poste de pilotage, installé sur la plage arrière de l'Ile de Ré. La visibilité était excellente malgré un fort courant de profondeur. Dans l'ensemble le fond était régulier avec peu de vie marine. Quelques objets insolites furent repérés au sonar : une batterie et une masse métallique habitée par un nautile et des poissons.
La zone de recherche de 150 km2 correspondant à nos hypothèses du lieu de naufrage, couverte au sonar latéral par les deux précédentes expéditions du NO Alis, n'ont pas permis de découvrir d'autres cibles potentielles aux dimensions du MS Monique. Si un jour de nouvelles recherches sont entreprises, il faudra les faire dans la zone numéro deux définie dès le début du projet. Pour la mission d'identification qui vient de se terminer, nous remercions chaleureusement la société ALDA Marine, le commandant de l'Ile de Ré et son équipage pour leur professionnalisme et leur totale disponibilité pour notre recherche.
Le mot du Commandant…
Le sentiment qui domine est évidemment la déception, comme pour nous tous je pense. J’aurai voulu apporter des réponses à Monsieur Maurice Pelissou à bord et aux familles pour pouvoir dire « La Monique est là » afin que chacun puisse porter un point sur la carte du deuil. Cela restera un formidable moment, fort en émotions. Je voudrais saluer la ténacité de l’équipe ROV qui n’a pas ménagé ses heures ainsi que tous les participants qui ont montré un haut degré de camaraderie et de professionnalisme. Il est très rare de pouvoir compter sur les dirigeants d’une société comme ALDA Marine* qui nous a fait confiance et apporté sa participation à ce projet.
Il a été extrêmement gratifiant pour moi et mon équipe d’avoir pu mettre la haute technologie du navire au service de cette mission et de FMC. Le ROVJET 402 a rempli son rôle à la perfection et a encore démontré si besoin était que ce type de navire et de véhicule sous-marin peuvent servir à d’autres opérations que celles de l’industrie du câble. Nous n’avons pas identifié l’épave, soit. C’est une étape de plus dans cette longue quête depuis 1953, année de ce tragique évènement de mer. Tenant compte du balayage sonar de la zone par FMC, cette tentative d’identification aura permis de dire avec une quasi certitude que La Monique n’est pas là. La porte reste donc ouverte et le « Mystère de la disparition de la Monique » demeure.
Cdt. Christophe Girard
A bord de l’ILE DE RE
Le dimanche 20 mars 06H30.
* ALDA Marine – Joint venture entre Alcatel-Lucent et LOUIS DREYFUS ARMATEURS
Les disparus de la Monique sont toujours présents dans nos mémoires. Nous ne les avons pas oubliés, mais la disparition tragique du caboteur reste toujours un mystère. Une nouvelle stèle commémorative a été inaugurée à Tadine (Maré), le 31 juillet 2013, en présence des hautes autorités coutumières, du Haut-Commissaire de la République, du Maire de la commune de Maré... Nous y étions invités.
Des discours, une jetée de fleurs, le chant de la Monique et des danses ont rappelé, qu’il y a 60 ans jour pour jour, à 14 heures, la Monique quittait son mouillage de Tadine avec 126 personnes à bord.
Si ce drame est toujours présent dans la mémoire calédonienne, la projection des documentaires de Vincent Pérazio sur la Monique (France Ô et dans l’émission « Thalassa » de France 3), en début d’année 2013, a ému les téléspectateurs européens. L’un deux, Eric Bauthier, collaborateur belge à la revue française de modélisme naval RC Marine, s’est intéressé à ce drame et a rédigé un bel article dans la revue n° 228 de mars-avril 2013. Les plans du navire n’ayant pas été retrouvé, il a sollicité un de ses amis, modéliste de talent, qui a les reconstitués à partir de photos et des quelques éléments dont nous disposions.
Une hypothèse du naufrage est émise par René Lefèvre : « de par son chargement mal réparti, la Monique accuse une gîte sur bâbord. Sachant que le navire possède deux moteurs, si celui de bâbord tombe en panne, alors que l’équipage n’a pas le temps de s’en rendre compte, le moteur tribord va accentuer le phénomène qui se combine avec un franc bord déjà dangereux. Il est facile de comprendre que l’eau va submerger le bateau en entraînant un échouage probablement rapide. »
Et Eric, d’ajouter : « Ce phénomène s’est révélé sur le premier bateau radiocommandé de l’auteur, alors adolescent, au centre de gravité bien trop élevé, dont une hélice était bloquée par des algues. La maquette ne chavira pas mais sa gîte était importante. »